dimanche 13 avril 2014

Pleasantville

Le-Bon-Film-Pas-Connu-du-Mois-d'Avril est.... 




Sorti en salle le 17 février 1999

Réalisé par Gary Ross

Avec Tobey Maguire, Reese Witherspoon, William H. Macy, Joan Allen, Jeff Daniels...

Nationalité : américaine 

Genre : De l'American Way of Life au totalitarisme

Durée : 1h54 




Pour s'extraire des angoisses d'une famille stressée et divisée des années 1990, David aime s'évader en regardant la télévision et plus particulièrement "Pleasantville", série en noir et blanc datant des années cinquante. Jennifer, sa sœur jumelle, est tout l'opposé de David : elle vit au jour le jour en parfaite harmonie avec le monde moderne. Jusqu'à ce que, par un étrange phénomène, Jennifer et David se retrouvent parachutés à "Pleasantville". Désormais intégrés au casting, ils vont parasiter la série au point de changer la vie bien réglée des protagonistes.







Mais c'est quoi ce film ?! 



Le printemps arrive. Les fleurs dansent dans les arbres. Les oiseaux chantent. Les couleurs sont de retours. C'est beau, ça donne envie d'aimer, d'être aimé... Pardon. Je sais pas ce qui me prend. C'est pas Vivement Dimanche ici. Allez trêve de mièvreries. Mais il sera question de couleurs. 




Pleasantville est un film que j'ai découvert pendant le lycée, en cours de Cinéma Audio-Visuel où l'on s'est intéressé aux techniques de colorisation et à l'écriture de scénario. Au demeurant simple, Pleasantville est un long métrage plus ambitieux qui se montre parfois brillant en terme de trame scénaristique ou d'utilisation de la caméra. 


Le film démarre avec la bande-annonce de la série tv Pleasantville, en noir et blanc mettant en scène une famille de bien-pensants dans une Amérique puritaine et conformiste des années 1950. C'est le programme favori de David, gros nul que tout le monde ignore dans le campus. Il est interprété par Tobey Maguire qui s'entraîne pour son futur rôle de Peter Parker. A noter que c'est son tout premier rôle principal. Il joue un personnage introverti qui a besoin de cette série rassurante et codifié pour fuir ses problèmes sociaux et familiaux. Sa soeur Jennifer (jouée par Reese Witherspoon dont j'ai toujours du mal à prononcer correctement le nom) est justement l'antithèse de David. Petite biatch aguicheuse et pas fâchée avec la gaudriole, elle est le stéréotype de la blonde de campus qui mâche son chewing-gum bouche ouverte avant de cracher sur une autre camarade qui essaierait de lui piquer le quaterback local. C'est d'ailleurs pour cette raison que David et Jenn vont se disputer la télévision. Maman (jouée par Jane Kaczmarek, oui, oui, le reum de Malcolm) étant parti pour se défaire d'une dépression, David veut se faire un marathon Pleasantville pour gagner un concours à 1000$ et Jennifer invite son copain pour lui manger la bouche devant un concert de MTV. Après un superbe faux champ/contrechamp de la préparation des deux génies terminant sur les deux mains sur l'appareil : Baston, cris, jérémiades, la télécommande tombe, se casse. Ding Dong. Un vieux réparateur qui sort de nul part. Chelou. Et c'est à ce moment que le film devient fantastique. 


Même ici, personne ne m'aime...


OOOOOOOh il chouine le nerd !!!

Ce vieillard un peu barré, voyant la passion de David pour la série tv, lui donne une télécommande au look rétro 60's afin qu'il soit "carrément dans le show". Blague de pépé, les voilà dans la télé. David devient Bud Parker. Jennifer devient Mary Sue Parker. Et ils doivent rester dans Pleasantville au moins deux semaines. Deux semaines que cet univers cucul la praline arrosé de sirop d'érable. 

Cela me donne l'occasion de parler du monde de Pleasantville où l'on se rend vite compte qu'il est clôt, hermétique et terriblement codifié. Prenez tout vos clichés de l'Amérique des 50's avec les pancakes, les quartiers sans l'ombre d'une fausse note, les femmes à la cuisine, les hommes refaisant le match de basket chez le barbier, les enfants bien coiffés, bien habillés (quoique), avec tous ces SOUUUURIRES COLGATE WHITE MENTHE BOUCHE, c'est ça Pleasantville. Un univers parfait. Sans erreur. Les joueurs de basketball réussissent leurs shoots à chaque coup. La route principale se finit par un retour à la route initiale, comprenez ici qu'on ne peut sortir de Pleasantville. D'ailleurs, les habitants n'ont même pas l'idée qu'il existe autre chose. On se croirait dans un RPG avec des PNJ (personnages non joueurs, ndlr) qui font les mêmes tâches inlassablement. Les livres n'ont que des pages blanches. Le sexe, la colère, le feu, bref tout ce qui peut altérer l'esprit de chacun n'existe pas. L'originalité même, est un concept inconnu qui n'a rien à faire dans cet univers fermé mais heureux. Du moins, c'est ce qu'ils croient.


Vous reprendrez bien un peu de cake au salsifis ?

Si David (alias Bud) se sent comme un poisson dans l'eau dans la série qu'il aime, ce n'est pas le cas de Jennifer devenu Mary Sue. L'époque de grand papa, c'est pas son truc. Dévergondée comme ce que redoute Christine Boutin, elle ne va pas vraiment chercher à s’acclimater à Pleasantville mais plutôt montrer à ces cul-serrés la réelle notion de plaisir. Ce personnage au demeurant caricatural est l'élément perturbateur qui va permettre au film de dévoiler une intrigue plus profonde que la simple comédie et une originalité graphique qui sert l'histoire. 


La petite coquine.


Mary Sue s'attaque tout d'abord au beau gosse Skip, interprété par Paul Walker (future tête brûlée dans Fast & Furious). Ce dernier est d'ailleurs affolé et croit être tombé malade quand la sauce commence à monter. Mais non mon petit, c'est juste ton trilili qui se découvre une utilité. Skip the Use. Pardon. 
Dès lors, une première couleur lui apparaît. Le vrai rose d'une rose. Petit à petit, les habitants de Pleasantville se laisse aller à l'originalité, au plaisir et la ville se colore davantage. 


Hommage. 


Pour se faire, le réalisateur Gary Ross dont c'est le premier film et son équipe tourne d'abord toutes les images en couleur. C'est en post-production que les choix de gris vont être faits. Au total, ce sont 163 000 images en format 35 mm qui vont être retravaillées pour donner cet effet particulier au film. Pleasantville a d'ailleurs détenu quelques mois le record d'effets spéciaux au cinéma jusqu'à la sortie de Star Wars : Le Menace Fantôme la même année. 
Par contre, pour la scène où Bud maquille sa mère devenu colorée, du maquillage vert a été appliqué au visage de l'actrice Joan Allen (ressemblant étonnamment à Michelle Fairley, interprète de Catelyn Stark dans Game of Thrones et qui avait déjà joué avec le petit Tobey Maguire dans Ice Storm d'Ang Lee) pour simplifier le travail de la couleur en post production. 




Cette arrivée de la couleur est l'effet visible de changements de fond qui se propagent dans Pleasantville. Les basketteurs ne sont plus parfaits. Les livres se remplissent. Bill (émouvant Jeff Daniels) découvre qu'il peut remplir ses tâches culinaires dans le désordre en même temps que se lancer dans une nouvelle passion. Les Pleasantins découvrent le plaisir des parties de jambes en l'air. Plus personne ne répond quand George Parker (formidable William H. Macy) rentre et dit "Honey ! I'm Home !". Et la pluie fait son apparition. La pluie. Cette abomination ponctuelle qui trempe les plus beaux dessous. Et tout ceci n'est pas du goût des vieux mâles qui, s'ils ne sont pas contre un coup de lorgnette sur les atouts de Stacy, ne supportent pas de perdre le contrôle de Pleasantville. Cette seconde partie donne davantage de poids à l'histoire de Gary Ross puisqu'on en vient à une situation semblable au totalitarisme. Les "colorés" perdent leurs droits et ne sont plus acceptés par les "gris" qui comptent bien conserver et rétablir les bonnes valeurs d'Oncle Sam. Il n'est pas étonnant de voir d'ailleurs que les deux seuls ouvrages évoqués dans le film sont Les aventures de Huckleberry Finn de Mark Twain et L'Attrape-cœurs de J. D. Salinger, deux des livres les plus censurés aux Etats-Unis. Après tout, "le péché est la seule note de couleur qui subsiste dans le monde moderne" (Oscar Wilde). 


Problème, ici  les pompiers ne s'occupent que des chats. 


Je vais m'arrêter là, il ne faudrait pas non plus tout vous dévoiler sur ce petit film aussi original qu'ambitieux dans sa forme et son fond. Je vous invite donc tous à vous le procurer (ou me le demander, je l'ai trouvé par miracle dans une brocante) et à passer un bon moment. Entre le gris et la couleur. 





Kaal. 


PS : Et dire que le réalisateur Gary Ross se pétera les dents quelques années plus tard avec cette affreux film qu'est Hunger Games
PPS : Je vais encore me faire taper par Roxy. 










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